Singapour, une « smart nation »
Singapour, une « smart nation » ![]() Dès le début, Singapour a été pensée par son fondateur, Lee Kwan Yee, comme une smart city, et plus, comme une smart nation. Singapour est devenue quelque chose là où il n’y avait rien d’autre en 1965 qu’un conglomérat d’habitations insalubres. Singapour est aujourd’hui une ville au confluent d’une multitude d’activités qui a embarqué très tôt dans la révolution numérique grâce à des politiques publiques innovantes. C’est le fruit, certes, d’une planification, ou mieux, d’une pensée globale, centralisée, mais qui fixe un cadre institutionnel permettant à la ville de se construire par les initiatives et la vie de ses habitants. Elle est pensée comme un système de vie et non comme les « machines à habiter » à la Le Corbusier ou des architectes staliniens.(...)
C’est un exemple d’intégration fonctionnelle que permet aujourd’hui la modélisation des systèmes complexes. Habitat, travail et transport sont conçus de manière à ce que l’on ne passe pas plus de 45 minutes par jour en déplacements, quand les habitants de Mexico y passent quatre heures. Ses fameux arbres artificiels concentrent les fonctions de collecte de l’eau de pluie, de l’énergie solaire, de climatisation, de traitement du CO2 et d’agrément.(...)
Dès le début, le président Lee Kwan Yee a compris la dynamique des rendements croissants pour financer le développement de Singapour, ville de taudis en 1965. La vision était de bâtir « une cité dans un jardin » alliant esthétique et qualité de vie des habitants. L’État est donc à la fois entrepreneur en ce qu’il investit directement et entreprend, et architecte en ce qu’il fixe les métarègles du développement de la ville qui sont en l’espèce très contraignantes vu son espace réduit, mais vu aussi les exemples catastrophiques de développement urbain des villes du Sud-est asiatique. L’avantage naturel offert par le port a attiré le capital étranger qui a été investi dans le développement local. Ce faisant, la cité-État a accru sa capacité à attirer de nouvelles grandes entreprises et ainsi de suite, l’enjeu devenant le maintien de la cohérence de la ville et le rythme de sa croissance. Singapour a consacré à la constitution de son capital d’éducation trois fois le montant de l’investissement direct de l’étranger. Accumulant les innovations, la ville est capable de les exporter, accroissant ses possibilités d’autofinancement. Le développement pose à chaque étape un nouveau défi, et quand la ville se présente aujourd’hui comme un archétype visionnaire de la ville globalisée, elle n’échappe pas aux risques de la dysfonctionnalité sociale et spatiale des villes globalisées. Mais cette dérive naturelle, dangereuse si non pilotée, est une préoccupation gouvernementale dans une culture centrée sur l’équilibre des contraires qui craint les déséquilibres et la disharmonie. C’est le nouveau défi de Singapour.(...)
© ISTE Editions Ltd 2018
Pour aller plus loin sur le sujet
Les villes intelligentes réalité ou fiction Claude Rochet, professeur honoraire des universités, France.
En se fondant sur les nouvelles sciences de la ville, cet ouvrage présente la conception et le gouvernement de la ville intelligente, qui se basent sur la capacité des habitants de la cité à gérer les multiples interactions entre les fonctions urbaines, tant physiques qu’humaines. Dès lors, la technologie est un outil au service d’une finalité sociale et non un deus ex machina dont les vertus thaumaturges apporteraient l’intelligence à la ville.
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